Le canyoning interdit de séjour (Céline GAZAGNE)

« Millau, capitale des sports de pleine nature »… pour combien de temps encore ? Le canyoning, fleuron de ces pratiques en Aveyron, semble en bien mauvaise posture. 

Depuis avril 2001, chacun des sites praticables sur la zone Causse-Cévennes, et exploités par des entreprises millavoises, ont été interdits: l’Hort de Dieu (Gard), les gorges du Tapoul (Les Rousses, Lozère) et le canyon de Bramabiau (Camprieu, Gard).Enfin hier, un arrêté du maire de Saint-Jean-du-Bruel, René Quatrefages (RPR), a mis fin à la pratique du canyoning dans l’Aveyron en interdisant les gorges supérieures de la Dourbie. Il évoque « une fréquentation excessive qui accentue les risques ».

Les professionnels du tourisme sportif n’ont pas de mots pour exprimer leur colère. Cette décision est qualifiée de « dramatique » par Antipodes; Christine Mazerolles, pour Horizon, juge: « c’est une calamité et une mise en danger du tourisme sportif ». Cette interdiction représenterait en effet un important manque à gagner pour une quinzaine d’entreprises de la région, qui réalisent 40 à 70 % de leur chiffre d’affaires grâce au canyoning, et vingt-cinq emplois sont dès lors menacés. « Certaines entreprises vont être acculées au dépôt de bilan », ajoute Ivan Sorro, président du Syndicat des activités sportives de pleine nature.

Ces arrêtés interviennent en effet peu avant ou en pleine saison, et « sans dialogue préalable » entre les parties concernées. Qui plus est, à son avis, « toute une région est désormais en danger. Les touristes viennent ici pour pratiquer ce genre d’activités. Si on le leur interdit, ils partiront, dans les Pyrénées ou dans les Alpes. Choix qu’ont déjà fait bon nombre d’entre eux ».

« L’IMPRESSION D’AVOIR ETE MENES EN BATEAU »

Au syndicat, comme au Centre de ressources pour les métiers du tourisme en espace rural de la CCI de Millau, « l’impression de s’être fait mener en bateau par les communes des Rousses et particulièrement de Camprieu » est forte. Car dès le départ, les professionnels du tourisme sportif se sont délibérément inscrits dans une politique de concertation. Ils se sont engagés envers le maire de Camprieu, M. Castanié, qui se plaignait de la « mauvaise intégration de ces activités », à organiser bénévolement des projets de développement à long terme: projet pédagogique pour l’école, falaise-école, site acro- branches… Mais, « le maire est parti en vacances sans prévenir et sans même regarder notre dossier, qui s’il est adopté, ne sera pas mis en place avant la fin de la saison », indique la chambre consulaire.

D’autres reproches fusent encore. En ce qui concerne l’impact négatif du canyoning sur l’environnement, ces professionnels répondent: « Nous utilisons très peu de linéaire de rivière, environ 3 km, sur les centaines que compte la région ». « Ils en ont également marre de passer pour des saccageurs de la nature », s’insurge Ivan Sorro. Le canyoning se pratique deux mois par an et, jusqu’ici, « aucune étude n’a démontré un quelconque impact négatif sur l’environnement ». Mais, quoi qu’il en soit, ils rappellent qu’ils « respectent la nature, qui est outil de travail » et affirment « contribuer à son développement et à sa préservation, en sensibilisant les professionnels au sein du syndicat et les pratiquants lors des parcours ».

Quant à la « surfréquentation » sur la Dourbie, elle est la conséquence directe des interdictions précédentes, toute l’activité s’étant reportée sur ce même site. René Quatrefages s’est cependant engagé « à lever arrêté si l’interdiction sur le Tapoul est retirée, peut- être le 7 août, à la condition qu’une borne de sécurité soit posée.

Enfin, selon le dossier de la CCI millavoise consacré aux sports de pleine nature, ces arrêtés pourraient être déclarés « illégaux ». La réglementation stipule en effet que ces activités ne peuvent être interdites que pour des motifs de sécurité et, non comme l’affirme la chambre, « pour des raisons environnementales et économiques ».

Source article publié le 03/08/2001 par La Dépêche du Midi

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