Des microcentrales sur les rivières sauvages (Mountain Wilderness)

Une conférence de presse a été tenue le 8 septembre dernier à Grenoble, dans les locaux de la Maison de la Nature et de l’Environnement de l’Isère, pour alerter sur les projets hydroélectriques menaçant les dernières rivières sauvages des Alpes.

Animée par Jacques Pulou [1], elle a été organisée conjointement par la FRAPNA [2], le Fonds pour la Conservation des Rivières Sauvages, European Rivers Network (ERN), Mountain Wilderness, et les associations locales « Réciprocité Guiers », « Les amis du Casset » et « Nant sauvage ».

MENACES SUR LES DERNIÈRES RIVIÈRES SAUVAGES

Plusieurs cours d’eau remarquables du massif alpin, situés dans des parcs nationaux ou des parcs naturels régionaux sont menacés par des projets de petite hydroélectricité : le Nant Bénin, dans le Parc national de la Vanoise, le Petit Tabuc dans le Parc national des Écrins et le Guiers Mort dans le Parc naturel régional de Chartreuse. Ces cours d’eau ont un très bon fonctionnement écologique et hébergent une biodiversité rare ; Ils font partie des ultimes joyaux des Alpes à n’avoir pas été massivement artificialisés par les installations de production d’hydroélectricité depuis la fin du XIXe siècle. Diverses études menées depuis 1992 ont en effet montré que moins de 10 % des rivières alpines sont intactes.

 

 

L’EAU VIVE : UN ENJEU POUR LES ALPES

Mountain Wilderness a particulièrement insisté sur la valeur des espaces résiduels d’eaux vivantes. Un enjeu acté dans le Schéma Interrégional d’Aménagement et de développement du Massif Alpin [3], comme nous l’avons rappelé : « L’eau n’est pas simplement une ressource pour les habitants et les activités. Elle contribue également à la qualité des paysages, des milieux naturels et de la biodiversité : en particulier, en zone de montagne via les réservoirs biologiques dans les têtes de bassins versants et les milieux aquatiques associés (zones humides notamment). C’est une dimension incontournable dans les politiques de gestion à l’échelle du massif et des bassins versants. Le Massif doit donc œuvrer à la sauvegarde des derniers espaces naturels d’eaux « vivantes », veiller au principe de non dégradation des masses d’eau exigé par la Directive-Cadre sur l’eau, soutenir les actions de qualification environnementale et paysagère des rivières aménagées au-delà du raisonnable, défigurées et polluées, inciter à une gestion raisonnée de la ressource en eau, lutter contre l’artificialisation des cours d’eau et préserver leurs fonctionnalités écologiques. »

UN LABEL POUR VALORISER UN PATRIMOINE REMARQUABLE

Malgré leur caractère remarquable, ces cours d’eau ne bénéficient d’aucune mesure de protection réglementaire forte. Leur présence au sein des parcs ne les met pas à l’abri d’éventuelles altérations, en particulier celles liées au récent développement de la petite hydroélectricité. C’est pourquoi divers acteurs de la société civile ont choisi d’entrer dans la démarche initiée par ERN, le WWF France et le milieu de la pêche en 2007, permettant de créer de la valeur autour du capital naturel que constituent les ultimes « rivières sauvages » de notre pays.

Le Nant Bénin, a été labellisé « Site Rivières Sauvages » en 2017. Le Guiers Mort pourrait, lui, être labellisé en 2018. Ce nouveau label créé en lien avec Afnor Certification est porté par ERN et le Fonds pour la Conservation des Rivières Sauvages. Il reconnaît la biodiversité rare des derniers cours d’eau qui coulent librement ainsi que l’engagement volontaire des communautés riveraines à les protéger. Ces cours d’eau, peuvent générer de nombreuses richesses comme le montrent les labels déjà attribués, par exemple à la Valserine dans l’Ain. A l’heure actuelle, 12 rivières françaises ont déjà été labellisées. 95% du potentiel hydroélectrique de notre pays est déjà exploité, ce ne sont pas les quelques mégawatts tirés de ces microcentrales, eu égard aux dizaines de milliers de MW à installer dans le cadre de la transition énergétique, qui apporteront la solution.

ALLER PLUS LOIN

- Les informations complémentaires sur la conférence de presse
- La plaquette éditée par Rivières Sauvages
- La plaquette « Eaux vives » de Mountain Wilderness  

DANS LES ARCHIVES DE MOUNTAIN WILDERNESS

- Revue 93 : Espaces et espèces aquatiques de montagne
- Revue 82 : La wilderness d’eau vive  

[1Membre du directoire du Réseau Eau de France nature Environnement, Jacques Pulou est le piote du Réseau Eau de la FRAPNA

[2Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature

[3Document définissant les orientations stratégiques du massif des Alpes. Ces propositions sont assimilables à une feuille de route pour les régions et l’État sur la politique spécifique à conduire en faveur d’un développement durable du massif.

Source : article publié le 27 septembre 2017 par Mountain Wilderness Voir l’article